222 Bowery, dans le sud-est de Manhattan : derrière la façade banale et austère d’un bâtiment de brique qui accueillit l’un des premiers YMCA de la ville, s’est écrit un pan mémorable de l’histoire des avant-gardes new-yorkaises.

Le lieu a abrité, dit-on, l’atelier de Fernand Léger en exil. Mark Rothko y a peint des grands formats décisifs pour la suite de son œuvre. Dans les années 60, le poète John Giorno y a poussé les limites de son art tout en organisant des fêtes inoubliables, de folles soirées sex and rock&roll où la bohème se presse autour de William Burroughs. Le mage de la Beat generation après des années d’errance s’installe en effet au 222 dans l’entresol sans fenêtres que l’on appelle le Bunker.

Pièce par pièce, étage après étage, voici donc l’histoire extravagante de cet immeuble où sont nés nombres de films marquants, peintures, et poèmes. Le Bowery est ainsi un jalon incontournable de la pop culture américaine, version radicale, un haut lieu de la défense des droits des homosexuels, en pointe sur les questions féministes et le cœur battant de la lutte contre le Sida, quand les malades étaient abandonnés de tous.

Le 222 revit ici au gré des déambulations d’un narrateur énigmatique guidé par sa fascination et la nostalgie fougueuse qu’il éprouve pour ce repaire mythique tel un figurant qui veut à tout prix entrer dans le cadre, ce garçon curieux et un peu étrange nous entraîne auprès de tous ceux qui ont fait de NYC une ville prometteuse, excitante. Est-il aux côtés de ces fantômes désirables Le Passant du Bowery ?

L’AUTEUR :

Clément Ghys est rédacteur en chef-adjoint de M le magazine du Monde. Il a déjà publié Vadim, le plaisir sans remords (Stock, 2017).